Parler aux non-motards, un art diplomatique ?

Il est fréquent d’entendre des remarques désobligeantes sur les motards. Des clichés fondés sur des préjugés fallacieux. C’est, pour nous motards, dur à entendre et souvent compliqué à démonter car ces préjugés sont bien ancrés dans l’esprit de certains. Les motards ont déjà des clichés entre eux alors il semble évident que les « caisseux » ou piétons ne nous regardent pas toujours d’un œil rempli d’amour.

Le but ici n’est pas de blanchir la communauté de tous ses tords mais de faire le point sur ce que l’on nous reproche, pourquoi et comment apporter un autre regard sur notre famille.

Aussi, tout ce qui sera écrit dans cet article ne relève que de mon point de vue et de mes expériences et réflexions. Je ne souhaite pas donner de leçon ou juger les comportements même si cela peut sonner ainsi parfois.

Listons les clichés et les préjugés sur les motards

Le motard :

  • est irresponsable;
  • est irrespectueux;
  • est dangereux;
  • roule vite;
  • ne respecte pas le code de la route (inter-files et j’en passe);
  • fait trop de bruit;
  • croit que la route lui appartient;
  • est macho;
  • n’aime pas les automobilistes et les scootéristes et les cyclistes et les moustiques, etc.;
  • est barbu, tatoué et drogué (j’exagère un peu peut-être);
  • il est de plus en plus souvent une femme et ça ne change rien au reste de la liste.

Si tu as plus de 5 points de la liste précédente, peut-être est-il temps pour toi de te mettre au cheval.

Léa, durant la relecture de cet article.

On notera aussi qu’une grande partie de ces points sont attribuables aux automobilistes.

Pourquoi tant de haine ?

Mon expérience personnelle est que les gens qui ont des préjugés négatifs sur les motards ont simplement été confrontés à de mauvais comportements. Les seules interactions avec le milieu de la moto sont un dépassement dangereux et rapide ou un rider en mode gymkhana dans les bouchons. Ces personnes n’ont peut-être pas d’autre relation à la moto que le partage de la route avec notre communauté. Un seul point de vue, celui de la victime de ces monstres à deux roues.

On peut aussi ajouter une apparence un peu guerrière avec nos équipements et surtout un casque qui nous rend anonyme et nous déshumanise. On ne voit pas de sourire ou de peur derrière la visière d’un casque.

automobiliste non courtois

Tord ou raison, les vérités ne sont pas absolues

On ne va pas se mentir, quand t’as un jouet de 190 kg qui fait 150 chevaux, tu ne peux pas user les 4500 km de vie de tes pneus à 50 ou 80 km/h. On joue parfois avec la limite et la loi.

« Que celui qui n’a jamais pêché jette la première pierre »

Citation de St Jean dans un vieux bouquin.

Mais en voiture, les gens ne respectent pas non plus parfaitement les règles et la communauté d’automobilistes ne souffre pas de cette mauvaise réputation, (sauf d’une ville à l’autre car oui les parisiens roulent comme des merdes pour les Toulousains, et inversement proportionnel ou égal). Le motard sait que l’inattention guette tout le monde car le motard est aussi très souvent automobiliste.

D’autres roulent toujours plein phares ou zigzaguent sur leur voie, c’est l’aveu d’un ami qui m’avait surpris. L’objectif étant d’être vu. C’est important d’être vu. Je pense aussi que c’est anxiogène pour les automobilistes et peut générer de l’inattention sur les autres éléments de la conduite.

Automobiliste qui téléphone au volant en buvant du caféUne amie m’a rapporté que sa peur du motard vient du fait qu’elle ne nous entend souvent pas arriver et ne sait pas anticiper notre comportement. Aussi, si on reste derrière elle, elle sent une sorte de pression. Cela ne s’invente pas. Lorsqu’elle se serre c’est presque par obligation. Durant cette manœuvre, elle m’explique qu’elle est concentrée sur le fait de serrer sa voiture sur la droite et focalise sur la position du motard. Pendant ce temps là, elle perd une partie de son attention sur le reste de l’environnement routier. Elle n’est pas pilote, ce n’est pas son métier, et se serrer n’est pas une obligation mais c’est plus fort qu’elle.

Il est important de rassurer cette personne en lui disant que le motard qui est derrière est à priori conscient de ce qu’il se passe devant. Que l’on est autonome et que rien ne la force à nous laisser passer, surtout si les conditions semblent défavorables à la manœuvre.

Il est donc à mes yeux primordial de ne pas mettre la pression aux autres usagers et de les remercier de leurs efforts qu’ils soient utiles ou non, qu’ils soient faits avec plaisir ou pas.

Il y a aussi le phénomène « des deux roues utilitaires ». Cette très forte augmentation de moyennes et grosses cylindrées de type scooter ou trail routier sont utilisées uniquement en ville pour des trajets quotidiens. Cette tranche des usagés ne fait pas partie de la communauté à mes yeux et leurs comportements pour certains accentuent la propagation de préjugés. Peut être faudrait t’il les dissocier des passionnés de moto aux yeux du grand public ?

Le fond et la forme : les deux font la paire

Râler dans son casque a rarement fait changer le comportement inattentif d’un automobiliste. Il est de coutume, du moins en France, de saluer les motards que l’on croise. L’habitude de remercier les usagers qui nous laissent passer ou prennent soin de nous est de plus en plus ancrée dans les mentalités. Certains motards ne remercient que si la manœuvre leur a semblé utile. Pour ma part, je remercie dans tous les cas même si j’ai dépassé tout seul comme un grand. De ce fait, je signale que j’ai bien vu leur effort et que je suis touché par le geste.

Admettre ses erreurs et faire un mea-culpa lorsqu’on fait n’importe quoi aide aussi à montrer que nous ne sommes pas, en tant que motards, des surhommes trop orgueilleux. Mais il faut aussi, je pense, accepter les erreurs ou l’inexpérience des gens en face.

J’ai très souvent levé la main, posé les deux mains sur mon casque, joint mes mains comme un geste de prière ou fais un cœur avec les doigts pour signaler que j’avais conscience d’une erreur que j’avais commise. Cela additionné à un regard de chat botté et personne ne vous en voudra jamais vraiment.

motard qui fait un coeur avec ses doigts

Parlons aux gens

Quoi leur dire à ces haineux, à ces apeurés ?

Moi je dis les choses comme ci-dessous.

Premièrement, j’argumente avec un principe de la « minorité visible ».

 » Tu ne juges que ceux que tu vois, et j’aurais tendance à faire pareil, mais le motard qui respecte les limitations et qui te double correctement, tu ne le calcule pas souvent. C’est naturel mais du coup tu n’enregistres que le côté négatif. Ça demande un effort mais j’ai confiance en toi. Bisou cœur love ! « 

Une fois que cette prise de recul est faite il faut rapporter le motard à ce qu’il est. Un homme ou une femme venu.e de tous milieux sociaux-culturels.

Il peut être au RSA comme médecin ou tourneur-fraiseur. Sa seule condition de motard ne peut pas faire de lui un connard ! Oui il y en a, comme partout mais cela n’en fait pas une caractéristique.

On peut aussi éduquer les gens à notre culture et nos pratiques. Comment et pourquoi on double, qu’est ce qui est dangereux pour nous, quelles sensations on éprouve sur nos engins.

Lui :

Je comprends pas le plaisir de rouler en plein été dans un complet cuir noir sur un engin aussi dangereux…

Elle :

Tu sais, dans ton casque, tu es tranquille et personne ne te parle. Quand tu roules tu es 100% concentré sur la route et tu oublis tous tes soucis. Et la technicité du pilotage c’est fantastique. Et ce gros truc qui vibre entre tes jambes… Oulala !

Il est important d’aborder nos peurs pour expliquer aussi certains de nos comportements.

Quand tu vois le mec devant toi regarder son téléphone, le papy qui fait de la double pédale avec l’accélérateur et le frein comme s’il jouait en live avec Gojira ou que t’es en sandwich entre deux camions comme (je laisse ton imagination faire une métaphore car dans ma tête ça tourne toujours « PEGI – 18 »)… tu restes pas là, tu doubles vite.

Enfin, l’esprit motard est à mes yeux un argument de sympathie non négligeable. Et on a tous des histoires à raconter, drôles ou émouvantes.

C’est pas si noir en vrai

Personnellement, je croise beaucoup plus de sympathisants à la pratique de la moto. Les gens savent que l’on est vulnérables sur la route. Ils savent aussi de plus en plus que nos machines sont bien plus performantes que les autos et que l’on est beaucoup plus attentifs car nous avons moins de distractions. Pas de musique ou de téléphone, peu de GPS même si ça devient de plus en plus fréquent, et un feeling plus accru avec la route. Même sans contrôle technique, on bichonne bien mieux nos montures que la plupart des automobilistes.

Et, évidement, il y a beaucoup plus de motards qu’avant. Donc plus de familles et d’amis concernés.

Aller, maintenant on s’aime tous sauf les mecs en scooter !

(Je blague sur les scooters hein, j’en ai eu un à 14 ans ;-p )

Ce n’est que mon point de vue. Ce n’est que ma manière de gérer et de vivre ma passion sur la route. C’est une bouteille à la mer pour un partage plus conscient et bienveillant de ces larges traits noirs et abrasifs.

J’espère vous lire en commentaires et apprendre d’autres philosophies ou méthodes.

Bonne route à tous.

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